KETELAERS

Ces nus masculins choqueront-ils encore ? La question peut se poser : alors que le nu féminin s’expose aussi régulièrement que naturellement, le corps masculin n’a pas eu la même faveur. Il n’est pas neutre qu’il ait fallu attendre 2012 pour qu’un musée majeur, le Leopold Museum de Vienne, ose lui consacrer une exposition, suivie en 2013 par celle du Musée d’Orsay auquel cette présentation emprunte nombre de commentaires.
Et pourtant, la nudité masculine a constitué pendant longtemps une ligne de force de la création en Occident.

Plus que tous, les artistes de l’Antiquité puis ceux de la Renaissance, influencés par le fond culturel judéo-chrétien, sont considérés comme ayant établi une synthèse idéale du corps humain, incarnant l’idéal du héros. A partir du XVIIe siècle les formations d’excellence pour la sculpture et de la peinture d’histoire ont pour finalité la maîtrise de l’exécution d’un nu masculin.
Mais le XIXe siècle érige le corps féminin en absolu et en objet d’un désir viril assumé. L’esthétique réaliste qui s’empare de l’art occidental bouleverse la représentation de la nudité masculine : l’homme dénudé paraît encore plus obscène et choquant que la femme dans la société du XIXe siècle où règne la domination masculine et où prolifèrent les figures féminines. Seul l’homme moderne à la morphologie athlétique proche de l’art gréco-romain trouve un créneau de communication politique à visée totalitaire.

Cet héritage perdure. Il n’empêche pas l’art contemporain de reprendre le flambeau de la représentation du nu masculin : les dessins de Schiele, les sexes avachis de Louise Bouegeois, le thème gay de Pierre et Gilles ou les corps surdimensionnés de Ron Mueck en apportent une illustration sereine.
Les nus masculins de Greet KETELAERS doivent se lire dans le prolongement de cette fresque. Ils trouvent une inspiration dans les spectacles de danse dont l’artiste est une spectatrice assidue. Elle y mémorise figures et positions, qui serviront de point de départ à son imaginaire.
L’œuvre décrit moins anatomiquement un corps qu’elle ne met en valeur son langage. Les mains et les pieds démesurés appuient le sens du mouvement. La facture et la couleur très sobres renforcent l’expression de la sculpture.

Greet KETELAERS est née en 1950 à Furnes, en Belgique, où elle habite et travaille toujours. Parallèlement à ses fonctions d’enseignante, elle a suivi des études supérieures de sculpture, d’histoire de l’art et de dessin.
Depuis une quinzaine d’années elle accumule de nombreux prix et distinctions.